PARIS AU TEMPS DU REGENT

Le 9 septembre 1715, deux cortèges quittent Versailles. Le premier est le convoi funèbre de Louis XIV et se dirige vers Saint-Denis. Le second file vers Vincennes où va s’installer jusqu’à la fin de l’année, avant de rejoindre les Tuileries, le jeune Louis XV, devenu roi à cinq ans. Le nouveau roi attendra sa majorité monarchique, treize ans, pour régner. Pendant cet intermède, le pouvoir est exercé par son oncle Philippe d’Orléans, nommé régent. Ce 9 septembre commence un nouveau chapitre de l’histoire de France et de l’histoire de Paris, les deux étant alors de nouveau, pour un temps bref, intimement mêlées. C’est cette courte histoire que raconte une exposition, joliment illustrée et mise en scène, qui se tient au musée Carnavalet jusqu’au 25 février 2024.

Nouveau chapitre de l’histoire de France, donc, après les pesantes dernières années du règne de Louis XIV, placé sous le sévère magistère de Madame de Maintenon. Les années de la Régence se présentent comme celles d’une libération de la pensée et des mœurs. Cette atmosphère d’ouverture des esprits va rencontrer Paris. L’arrivée de la Cour et du gouvernement dans la capitale va simultanément laisser une empreinte durable sur la ville et donner une impulsion à la vie intellectuelle, alors que l’économie se trouve bien, malgré quelques soubresauts (dont le plus célèbre est la faillite du système Law), de la restauration des finances publiques opéré par l’excellent abbé Dubois, Premier ministre. Les financiers investissent la place Vendôme, l’aristocratie le faubourg Saint-Germain, où brillent les salons, le nouvel âge d’or que connaissent les arts décoratifs consolide le faubourg Saint-Antoine. Le théâtre s’épanouit avec Marivaux, Watteau charme encore, le jeune Chardin se révèle. La liberté, non sans peine, essaie de secouer le carcan : Montesquieu a affaire à la censure, Voltaire est brièvement embastillé. Mais au total, une époque où affleure tout ce qui mûrissait souterrainement, et qui prépare la suite : le siècle des Lumières. Le temps de la Régence s’achève vite : quelques mois à peine après la dévolution du pouvoir au roi, le Régent et l’abbé Dubois meurent. Entre temps, le jeune roi, en 1722, aura décidé de regagner Versailles, mais Paris va rester capitale intellectuelle. Le siècle de Louis XV peut commencer.

Tout cela, l’exposition du musée Carnavalet le raconte en images et en objets.

Coysevox Louis XV à neuf ans

Des meubles, des pendules de Boulle, des peintures (Coypel, Oudry et quelques-autres à côté de Watteau et de Chardin), des sculptures (le beau buste de Louis XV à neuf ans par Coysevox), des documents, des instruments de musique témoins

d’un temps qui fut musicien à l’image du Régent, en somme toute une plongée dans le siècle qui reçoit le renfort des techniques de maintenant : tableau tactile pour repérer la géographie parisienne de l’histoire, extraits de films (dont le superbe Que la fête commence, de Bertrand Tavernier, interprétation très libre de l’époque)… Au total, on l’a compris, une jolie réussite, qui doit beaucoup, notamment, à la scénographie de Violette Cros, Arnaud Roussel et Gabrielle Trévise, qui ont su traduire les données du commissariat scientifique de José de Los Llanos et Ulysse Jardet.

La Régence à Paris (1715-1723) L’aube des Lumières

Jusqu’au 25 février 2024

Musée Carnavalet 23 rue de Sévigné Paris

www.carnavalet.paris.fr