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Arts, cinéma, culture


L'EMPIRE DANS LA GRANDE GUERRE

Publié le 5 Mai 2024, 08:34am

Comment les hommes des colonies françaises ont été enrôlés dans la guerre de 14-18, dans quelles conditions ils l’ont faite, c’est à ce thème sensible que le Musée de la Grande Guerre de Meaux consacre sa présente exposition. Sensible parce que la polémique s’en est emparée ces dernières années : selon certains procureurs, ces hommes auraient été la chair à canon préférée de l’armée française, auraient été systématiquement mis en première ligne et donc été plus décimés que les autres combattants.

L’exposition apporte à cette polémique une réponse dépassionnée et documentée. Alors oui, des hommes ont été emmenés sur les champs de bataille plus ou moins volontairement. Mais non, ils n’ont pas été plus maltraités que les autres dans la grande boucherie que fut cette guerre.

Des chiffres ? Ils ont été environ 500 000, venus d’Afrique et d’Asie, qui ont rejoint les combats. Pour les faire venir, la France a joué de plusieurs cordes. Il y eut des volontaires, attirés par l’argent, le goût de l’aventure ou le pouvoir de conviction de quelque recruteur. Mais faute de volontaires en nombre suffisant, on a fini par passer à l’enrôlement forcé. Et 150 000 ont été mobilisés pour rester outre-mer dans différentes missions. Les combats en ont tué 75 000.

 

De ceux qui sont venus en France, qu’est-il advenu ? Ils n’ont pas eu droit à un temps d’acclimatation ; à peine débarqués, ils ont été envoyés au front. Ils ont combattu sur la Marne, sur la Somme, à Verdun. Ils ont donc été eux aussi des combats les plus durs, et leurs pertes, comme celles de tous les combattants, on été lourdes.

Mais l’exposition révèle aussi comment le commandement a essayé de faire place à leurs traits particuliers. A ces hommes du sud tropical ou équatorial, on a ménagé des moments de halte dans le sud de la France, moins rigoureux que le nord-est. Les musulmans ont été respectés dans leur pratique religieuse.

Le musée a choisi de donner des visages à cette histoire. Il y a les anonymes, les combattants de la troupe. Et puis il y a ceux dont, pour une raison ou l’autre, le souvenir est resté. Par exemple Bakary Diallo, berger peul du Sénégal. Engagé dès avant la guerre dans les tirailleurs sénégalais,  il vient en France dès la mobilisation en 14, combat sur la Marne, est blessé dès novembre 14 près de Reims, passe trois semaines dans le coma et plusieurs mois dans les hôpitaux, perfectionne son français, et écrit le récit de son aventure. Charles Terii Pignon est venu de Tahiti pour mourir dans la Meuse après avoir durement combattu pendant un an et demi. Parmi tous ces individus se détache la magnifique personnalité de Joost van Vollenhoven. Français d’origine hollandaise, fonctionnaire de l’administration coloniale, il avait, après avoir combattu et été blessé, été nommé gouverneur général par intérim de l’AOF où il s’était opposé aux mobilisations de plus en plus autoritaires et inutiles, avant de retourner au combat pour y trouver la mort en juillet 1918.

Reste en effet que 500 000 hommes ont été engagés dans une guerre dont rien ne dit qu’elle était vraiment la leur, et que cela seul suffit à rendre ces enrôlements insupportables.

L’exposition a été montée en puisant exclusivement dans les ressources du musée, qui prouve ainsi ses richesses et le talent qu’ont ses équipes pour les exploiter.

Elle est accompagnée d’un solide catalogue, vrai cours d’histoire sur cette période qu’elle éclaire, en la situant dans le long mouvement de la colonisation française.

 

Combattre loin de chez soi. L’empire colonial français dans la Grande Guerre

Exposition jusqu’au 30 décembre 2024

Musée de la Grande Guerre rue Lazare Ponticelli 77100 Meaux

www.museedelagrandeguerre.com

Catalogue Edition Musée de la Grande Guerre et In fine 25 euros

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