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Arts, cinéma, culture


BERNADETTE LAFONT L'INDOMPTABLE : LA PREUVE PAR CINQ (FILMS)

Publié le 27 Décembre 2023, 16:29pm

La fiancée du pirate

Cinq films avec Bernadette Lafont, cinq films de ses (en gros) quinze premières années de carrière vont ressortir en salle le 27 décembre. Cinq films aux tons très différents, à l’image de la carrière prolifique et variée qui fut celle de l’actrice. Cinq films hommages à son talent immense et singulier, et que résume bien le titre générique donné à la sélection : Bernadette Lafont l’indomptable.

Elle avait bien commencé, accompagnant les premiers pas de la Nouvelle vague : le délicat court-métrage de Truffaut, Les mistons, et le premier film de Claude Chabrol, le très remarqué Le beau Serge. Sa personnalité, déjà, y éclatait, avec sa démarche et sa voix nonchalantes, ses yeux vifs, une présence qui crevait l’écran.

Parmi les cinq films qui ressortent, il y a justement un Chabrol, Les bonnes femmes. C’est, en 1960, le troisième film de Cbabrol qui, après Le beau Serge, avait réalisé Les cousins. Ce film de jeunesse n’est pas le plus éclatant de la filmographie du réalisateur, mais il est déjà bien là ;  Bernadette Lafont y partage la vedette féminine avec Stéphane Audran, déjà présente dans Les cousins, et dont Chabrol ne pourra plus se passer, ni à l’écran ni à la ville. Bernadette Lafont et Stéphane Audran y ont, y compris dans leur jeu, deux registres différents et complémentaires. Chabrol y affûte ses armes, s’essaie à dessiner des personnages féminins, genre dans lequel il devait tant exceller.

 

Les bonnes femmes sont en définitive un film plutôt sage, ce que n’est pas La fiancée du pirate. Le film de Nelly Kaplan eu à sa sortie, en 1969, un succès grand et mérité. Les planètes semblent s’être alignées autour de ce bijou. Nelly Kaplan y est au meilleur de son inspiration, inventive, drôle. Bernadette Lafont semble se couler avec délectation dans le rôle d’une mauvaise fille de village au fort caractère. Le reste de la distribution est à l’avenant, où l’on croise avec plaisir Michel Constantin, Jean Guiomar et un Jean Parédès campant un drôle de pharmacien. Le scénario comme les dialogues de Nelly Kaplan et Claude Matovsky sont  d’une verve réjouissante. Bref, La fiancée du pirate est un film dont on ne se lasse pas. On envie ceux qui vont le découvrir…

 

C’est un tout autre sort qu’a connu le film sans doute trop iconoclaste de Jacques Baratier, La ville-bidon (1976). Il a connu, si on se laisse aller à cette facilité, ce qu’on appelle un »bide ». Sans doute y avait-il de quoi. Il ne faisait pas bon, dans les années soixante et soixante-dix, mettre en doute les vastes programmes d’aménagement urbain, qui plaisaient tant à l’Etat, aux élus et aux promoteurs immobiliers. Le film peint un temps où les villes nouvelles poussaient comme des champignons, et faisaient table rase. Jacques Baratier était de ceux qui dénonçaient l’inhumanité du processus et du résultat. Il s’était assuré de la complicité de la romancière Christine Rochefort, qui elle-même avait un vif intérêt pour la société de son temps. Bernadette Lafont ? Elle donne chair à un personnage qui reste à distance de la folie qui l’entoure, comme le fait l’impassible Roland Dubillard en gardien d’immeuble effaré par la situation, et dont les mots prémonitoires à la fin du film n’étaient pas alors audibles par tout le monde : « J’attends même pas vingt ans, pour voir comment tout ça va pourrir, comment tout ça va culbuter à la décharge… ». Montrer aujourd’hui ce film mal reçu est une bonne œuvre, qui en outre ravive le souvenir du beau cinéaste que fut Jacques Baratier, auteur notamment du ravageur « La poupée», histoire de dictature inspirée d’un roman de Jacques Audiberti qui en signa l’adaptation.

 

L'amour c'est gai, l'amour c'est triste

Bonne idée aussi que celle de se souvenir de Jean-Daniel Pollet, qui a filmé une étincelante Bernadette Lafont dans L’amour c’est gai, l’amour c’est triste ». A côté du lunaire et effacé Claude Melki, acteur fétiche de Jean-Daniel Pollet, Bernadette Lafont joue une prostituée pleine de santé et de joie. Le très brillant Rémo Forlani avait écrit le scénario, et on lui doit aussi des dialogues pétillants auxquels le film doit beaucoup. Bernadette Lafont s’empare de ses mots avec gourmandise, Elle y est joliment entourée d’acteurs qui ont plaisir à faire leur numéro, Jean-Pierre Marielle en souteneur magnifique, Marcel Dalio en imprévisible client… On aime bien aussi voir la jeune, jolie et talentueuse Chantal Goya d’avant ses gentils enfantillages. Passent aussi dans le film, entre autres, Jacques Doniol-Valcroze et Luc Moullet : le cinéma a ses familles.

 

Dernier film de la série : Les stances à Sophie, de Moshe Mizrahi. (1971). On retrouve Christiane Rochefort, le film s’inspirant d’un de ses romans du même nom qui avait eu un honnête succès. La romancière signe des dialogues inégaux. Le tout baigne dans un climat postsoixantehuitart, il est parfois rigolo par sa caricature du mouvement hippie en pleine découverte par la France. Mais Mizrahi n’est pas Baratier, et il réussit moins à Christine Rochefort. Bernadette Lafont se tire à son avantage d’un rôle double (fille libre, puis épouse bourgeoise) qui justifie peut-être la présence de ce film dans la sélection. Elle y est entourée d’un Michel Duchaussoy que son rôle inspire peu, et de Bulle Ogier, beau complément de Bernadette Lafont. Le meilleur du film est sans aucun doute dans les scènes entre ces deux magnifiques actrices.

 

 

 

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